mercredi 16 mars 2011

SEMAINE DIX






Tel que prévu, des photos...
Le pagne de la journée de la femme 2011
Trois photos de la cour extérieure de ma maison dont une avec mon gardien de nuit, Dominique Bouba. Sur la deuxième photo, vous pouvez voir ce que mon gardien de nuit a fait pour moi, un toit de paille soutenu avec des troncs d'arbre habilement taillés, attachés et plantés dans le sable...Tellement beau...
Sur la quatrième photo, ma toilette extérieure...Un simple trou...
La dernière photo, moi-même avec mon costume du 8 mars...

8 mars 2011
Mon 8 mars a débuté le jour où j’ai appris que mon employeur offrait le pagne traditionnel à toutes les femmes à son emploi.
Et de vous préciser davantage, le pagne est une pièce d’étoffe qui sert à la fabrication du costume traditionnel. Chaque année, un motif est créé pour l’occasion.  Accompagnant ce texte, vous trouverez le motif de l’année 2011 et pourrez y lire le thème de la journée du 8 mars 2011 :
Femmes : Partenaires incontournables du développement
Sur la photo ci-haut, vous me verrez avec mon pagne ayant servi à la confection d’un cabas, robe ample dont les mesures sont simples. Il n’a suffi qu’un œil scrutateur pour que ma couturière me confectionne un cabas sur mesure. Tout était parfait.
Et ce 8 mars 2011…
Honnêtement, je ne savais trop ce qui m’attendait et, n’eut été de ce costume, des efforts de la couturière à me confectionner et livrer mon costume à temps, je serais resté sagement à la maison.  Or, je devais honorer l’invitation et porter fièrement ce costume. Je n’avais pas le choix.
Vers 09h00 le matin, vêtu de mon cabas, je me rendis au stade de la ville où la fête se déroulait.  Le trajet fût ralenti par des félicitations, des poignées de main et des «Bonne fête» de toutes parts. De toute évidence, les Camerounais aiment que nous portions le pagne.
Certaines coupes de leur costume moulent si bien les courbes de la femme Africaine qu’on croirait que Joseph Ribkoff est venu copier les couturiers d’ici avant de lancer sa carrière.     
Une fois arrivée au stade, seule, je me rendis près de l’estrade et très rapidement, un placier m’indiquait l’endroit où je devais m’asseoir.  Je devenais invitée d’honneur. De toute évidence, la couleur de ma peau y était pour quelque chose.   
Et puis, les gens sont arrivés. Des hommes venus assister au défilé et des femmes portant fièrement le «fameux» pagne du 8 mars 2011. 
Ce pagne importe. On en parle longtemps à l’avance.  Plusieurs femmes se priveront de participer aux activités simplement parce qu’elles n’ont pas le pagne. Plus encore, on dit que les maris paient très cher leur impossibilité ou leur refus d’acheter le pagne à leur femme. On me raconte qu’une femme aurait brûlé la récolte de son mari parce que celui-ci ne lui avait pas offert son pagne…Reconnaissez que c’est du sérieux !
Mais, il y a aussi celles qui n’assisteront pas à la fête pour bien d’autres raisons.  Un paysan rencontré la veille du 8 mars me disait qu’il ne pouvait acheter le pagne à sa femme et que de toute manière, il valait mieux qu’elle n’assiste pas à la fête.  Il prit alors le temps de nous expliquer et dans ses mots ce que j’ai retenu : «…vaut mieux qu’elle reste à la maison pour les travaux, ça c’est bien. Là-bas, les femmes boivent trop, ce n’est pas bien…»
Retour à cette journée du 8 mars 2011…
Et puis, sise dans les estrades, me sentant un peu étrangère, mon téléphone sonna.  Je dois rejoindre celle qui a cousu mon costume.  Elles sont tous là, des employées que je rencontre pour la première fois puisqu’elles ne sont pas dans le même village que moi.
J’apprends que nous défilerons.  On m’enseigne le pas ainsi que le salut militaire que nous devrons faire lorsque nous serons devant les dignitaires.
Une, deux, une, deux, gauche, droite, gauche, droite, etc.
Tel un métronome, je bats la mesure au rythme prescrit par notre cheffe, notre grande cheffe.
Stratégiquement, on me place bien en vue en disant que ce serait bien que «la blanche» soit visible. J’achète tout, je dis «oui» à tout.  Je suis docile. 
Pour ceux qui en doutent, je vous dis que c’est vrai. «Docile» est le bon mot. 
La journée se poursuit. J’apprends que les femmes se sont cotisées, 2500 Fr pour les préparatifs du déjeuner (diner pour les québécois).  Je donne ma part avec joie.
Avant de continuer, toujours en mémoire, les contrastes croustillants relevés expressément pour vous lors de cette journée de la femme 2011 :
-        Les deux premières rangées de l’estrade sont occupées par des hommes et deux ou trois femmes seulement dont : la femme du préfet et la présidente de l’organisation de la journée de la femme 2011.
-        Lors du discours d’un des dignitaires, alors qu’il présentait la présidente de la fête, celui-ci mentionne : «…cette femme est un modèle de réussite, elle a étudié, elle s’est trouvé un emploi, elle a travaillé ailleurs, elle a voyagé, et elle a su se trouver un mari…»
-        À la radio : «…cette journée internationale des femmes organisée sous l’œil bienveillant des hommes…».
Assez, revenons au déroulement de ma journée.  Après avoir bien défilé, nous nous réunissons au bar extérieur d’un collègue de travail.  N’oubliez pas que je suis entourée de chrétiens et non de musulmans.  La consommation de boissons alcoolisées est permise.
Une fois sur place, cette dame qui a cousu mon costume s’éclipse et nous revient une heure plus tard avec le poulet, le pain, la sauce, les assiettes et les ustensiles. Les bras bien chargés, sourire aux lèvres et toute l’orchestration nécessaire à rendre la fête des plus agréables.
Et puis, la surprise, les collègues masculins du travail nous rejoignent.  Ils sont tous là.  Les femmes les ont invités…
On me demande de faire une brève allocution puisque je suis la nouvelle venue.  Les éléments à mentionner : l’objectif de la rencontre, les remerciements aux hommes pour leur présence et trouver un volontaire pour le bénédicité.
J’ai fait rire l’assemblée en leur mentionnant que c’était la journée de la femme, la fille, la maman, la grand-maman, la sœur, la tante, l’écolière, la lycéenne, la travaillante et je terminais avec le gène femelle…
De bonnes conventions, les invités se servent en premier…Par conséquent, les hommes se servent en premier.  Nous buvons et mangeons et…J’ai ri, mais ri comme pas possible.
On n’a pas cessé de me dire combien mon cabas me faisait bien.  L’atmosphère était bonne. 
Ce matin-là, j’ai hésité avant de me rendre à la fête.  Je ne savais ce qui m’attendait.
Maintenant, comment vous décrire le bien-être qui suit nos appréhensions inutiles face à l’inconnu. 
Chaque fois que mes craintes vagues et indéfinissables sont matées par l’énergie humaine des gens que je rencontre, je me sermonne.
Boire, manger, rire et sourire…Un amalgame qui dynamise nos vies. Partout où nous sommes, cette formule enjolive, sublimise et magnifie…Partout…Peu importe l’endroit…Une formule internationale…
En retrait, cette autre femme qui assurait la comptabilité des sommes amassées afin de nous servir la boisson (alcoolisée ou non) jusqu’à épuisement des fonds.  J’ai ajouté ma tournée.
Le lendemain, sur la route, je croisais l’une d’elle qui me disait en riant : «…et j’ai dit aux autres que pour nos futures rencontres, Alyne est invitée d’office…» Et de rire encore plus…Sans ajouter quoi que ce soit…Se remémorant notre soirée sans dire un mot…Que nos yeux qui échangeaient et nos mains qui se serraient…
À vous tous, femme, fille, maman, grand-maman, belle-sœur, tante, filleule, nièce, amie, écolière, lycéenne, travaillante et porteuse du gène femelle…
Bonne fête des femmes en retard et…Buvez, mangez, riez et souriez…

2 commentaires:

  1. Mon Alyne adorée

    Et bien, j'avoue que le rose te va bien, une belle madame.....en même temps, je te félicite de nous représenter, petite femme blanche parmi la noirceur...tu fais du bon boulot. Bravo.

    Je pense que ce sera mon dernier commentaire jusqu'à mon retour fin avril de la Floride. Et oui, je quitte la semaine prochaine et d'ici là, beaucoup de préparatifs à faire, donc, je te souhaite une bonne continuation et j'ai bien hâte de lire la suite. Prend bien soin de toi et je t'envoie plein de bisous.

    Ta meilleure
    xxxxxxxxxxxx

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  2. Ma chère, chère Alyne,
    Ton texte m'émeut. Je t'imagine défiler dans ton beau costume du 8 mars, parmi les femmes de là-bas et je suis tellement fière de toi et pour toi! Je te vois rire, payer la tournée et profiter de la vie! Tout ça est tellement inspirant!
    J'ai sourcillé à quelques reprises sur les commentaires des hommes et leur statut bien particulier dans cette journée dédiée aux femmes, mais je me dis... Ici, pas de grande fête, pas de robes spéciales et mon chum qui s'est repris à 3 fois quand je lui ai demandé quel jour on était, alors....
    J'ai déjà hâte à la semaine prochaine!
    Catherine xxx

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