Au fur et à mesure que les semaines passeront, je vous enverrai des photos de mon domaine.
Première photo : La porte extérieur menant à ma petite maison.
À gauche de la porte, un espace pour brûler les déchets. Ça semble terrible mais vous verrez...Une fois cette porte traversée, vous êtes chez moi...dans mon humble demeure...À suivre...
Deuxième photo : Mon fils et ma belle-fille qui ont répondu à mon blogue sur les «petits coins»...Je vous partage mon plus grand fou-rire de la semaine...
Chapitre
Son témoignage était si généreux que je décidais, séance tenante, de vous le partager.
Son histoire. Un chapitre de son histoire. Je vous parlerai de cet homme rencontré au cours d’une rencontre d’échange entre organismes luttant contre le VIH.
La réunion est organisée par VSO. Il est un bénéficiaire choisi pour venir témoigner de la contribution de VSO auprès de son organisme et des résultats auprès des bénéficiaires que lui-même dessert.
Nous avons passé l’avant-midi ensemble. Ils étaient deux, j’étais leur «facilitatrice». Des questions de toutes sortes se voulant de faire le portrait actuel des choses, mais surtout, de ce qui fut réalisé au cours de la dernière année.
À la fin de cet avant-midi bien rempli, il resta devant moi et, d’une voix calme, réfléchie et posée, sans que je lui demande quoi que ce soit, il amorça son récit.
Pour mon blogue, je tenterai d’être fidèle à ses mots, en italique vous les reconnaitrez.
Un jour, il a eu le palu (paludisme), et ce palu l’a rendu encore plus malade que d’habitude. Dès lors, son inquiétude s’est installée. Il a parlé à sa femme, lui demandant si lors de ses grossesses on lui avait passé le test de séropositivité. Elle disait qu’elle ne savait trop. Il a longuement réfléchi et a décidé d’aller voir l’homme qui travaille aux services sanitaires. Celui-ci lui a demandé si sa demande était sérieuse considérant les coûts.
Il était sérieux. Il voulait comprendre son palu. Et puis, il a su. On lui a dit. Et sa femme a également passé le test et elle a su. Sa tête était troublée me dit-il…Et ses enfants…Ses cinq enfants…Bien eux…Ils n’ont rien su, car il n’y avait rien…Un baume sur leurs plaies séropositives…Physiques et morales…
Et puis, sa femme a été malade. Très malade.
C’est à ce moment que j’ai osé poser une question. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça…J’étais absorbée par son récit et impatiente d’en connaître le dénouement. Ma question propulsait l’histoire et j’ai saisi qu’il ne voulait rien laisser au hasard, que tout était important, et ce, dans les moindres détails. Il m’a regardé droit dans les yeux et m’a dit : «je te raconte l’histoire, il faut attendre».
Je me suis tu. Je crois n’avoir rien dit de plus sinon que quelques «hummm» ici et là.
Parait que la psychanalyse est née d’une intervention similaire, une patiente aurait dit à Freud d’écouter plutôt que d’interpréter ce qu’elle disait.
Il continua avec ses mots, son histoire, son récit.
Et puis, sa femme a été malade. Très malade.
Elle fut alitée, à quelques reprises, mais chaque fois, c’était toujours plus long. Et puis, la grand- maman est venue les aider, la marmaille était jeune, le besoin était grand.
Un jour, elle a dit à son mari qu’elle savait qu’elle partait. Il a couru chercher de l’aide. Aide inutile. Si j’ai bien compris, c’était le lundi et elle disait qu’elle partirait le samedi. Elle passa la semaine et le samedi prédit, elle quitta à 20h00.
Il prend le temps de me dire que la saison avant son départ, elle a tout fait. Les récoltes, la nourriture et qu’elle a pris soin de les laisser avec tout ce qu’il faut.
L’autre ami qui était à notre table s’est alors levé et a dit : «On a tous le même chapitre».
Le silence.
Et son histoire se poursuit. Dans les mois qui suivirent, il a eu un accident…«Tu vois les traces ici» et il me montra son arcade sourcilière, une vilaine cicatrice. Il me montra son poignet gauche difforme : une cassure. Un chaman lui a guéri en la brisant deux fois…À froid…
Et puis, on lui a volé ses moutons et sa charrue.
Et il termine en disant : «Dieu en a voulu ainsi».
Il vit maintenant avec sa maman qui l’aide avec les enfants. Il est actif dans son organisme. Tellement actif que lors de la création du réseau des organismes, il a été nommé président du conseil d’administration.
Il a présenté le résultat de notre travail devant la salle. Il était génial. Applaudi deux fois plutôt qu’une. Il dit que c’est l’homme qu’il a vu lors de son dépistage qui lui a montré à parler et à dire ce qu’il pense. C’est lui qui a soigné sa tête. C’est lui qui lui a montré à ne pas avoir honte. C’est lui qui lui a montré la route.
Cet homme qui l’a aidé, c’est mon collègue de travail. Un colosse de plus de six pieds 5 pouces qui croit que ses jambes sont trop longues lorsque vient le temps de voyage en autobus.
Bien sûr, nous retrouvons ce genre d’histoire partout dans le monde. Je vous la partage parce qu’elle fait partie d’une des histoires que je côtoie au quotidien. Loin de moi l’idée de vous offrir un guide touristique, je veux écrire sur leur vie, leur réalité, leurs habitudes, leurs différences, et ce, dans toutes les sphères possibles et impossibles.
Je termine avec un léger parallèle. Au Québec, sa femme serait «probablement» vivante puisque nos services de santé l’auraient prise en charge. Elle aurait bénéficié d’une médication gratuite, d’un service personnalisé, d’un suivi rigoureux, d’hospitalisation au besoin, il n’y aurait pas eu de «rupture de marchandise» en ARV (antirétroviraux). Elle aurait vécu sa séropositivité d’une manière différente.
Plus précisément, au cours de la dernière année, la région de l’extrême nord n’avait plus d’antirétroviraux. Ces trois mois sans médications leur ont semblé à tous interminables. Ces gens demeurent craintifs. Vous imaginez ce que ça signifie pour eux. La médication nécessaire à leur survie ne se trouve plus…L’équivalent d’un diabétique sans insuline…
Je continue, au Québec, la perte de ses moutons et de sa charrue aurait été moindre, son assurance aurait couvert une partie de sa perte.
Son poignet aurait été mieux soigné, il aurait été indemnisé par la SAAQ et n’aurait subi qu’une perte salariale partielle.
Et…Je vous entends d’ici…
Je sais…Au Québec, dans un contexte pareil, pas certain que sa maman aurait pu lui offrir autant…Elle aurait eu un emploi et n’aurait surement pu tout quitter pour le soutenir..
Leur force : leur famille, leur très grande famille.
Chair de poule.
RépondreSupprimerxx
Mon Alyne adorée
RépondreSupprimerJe te savais d'une grande écoute et je vois que maintenant, c'est un de tes atouts et se faisant, les gens me semblent en confiance avec toi et ton petit visage d'ange....continue de les écouter, c'est pour eux un réconfort,j'en suis certaine.
Prends bien soin de toi et d'eux!!
Ta meilleure
xxxxxxx
D'ici. que peut-on faire pour que l'aide se rende directement et soit plus efficace? Le sais-tu?
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